jean santerre <jeansanterre2013@gmail.com>
09/02/2016
to me
اللهم صل على سيدنا محمد و على آل سيدنا محمد و سلاما و تسليما
اللهم آمين
Le coaching destiné aux managers-communicateurs : un dispositif de communication ou d’évaluation ?
https://communicationorganisation.revues.org/1448
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Texte retravaillé et affiné sur le Coaching des managers: outils, finalités,critiques.
اللهم صل على سيدنا محمد و على آل سيدنا محمد و سلاما و تسليما
اللهم آمين
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Le coaching est un dispositif pour managers qui porte sur le développement de leur savoir être professionnel, dans une finalité de performance économique. La communication du coaching joue un rôle fondamental dans ce processus d’évaluation, tant dans les discours des consultants-coaches que par les formes communicationnelles contradictoires présentes dans le dispositif et la relation de coaching. Cette communication est un processus d’évaluation paradoxal, auquel s'initient les managers qui veulent évoluer dans leur parcours.
la logique du marché, qui érige la concurrence (et l’évaluation) en norme sociale générale s’étend à toutes les sphères de l’existence humaine (Dardot, in Gori, Cassin, Laval, 2009). La rationalité néolibérale produit des disciplines, qui ont toutes pour fonction de produire chez l’individu un mode spécifique de gouvernement de soi. Le coaching en entreprise (défini comme un « l’accompagnement de personnes ou d’équipes pour le développement de leurs potentiels et de leur savoir faire dans le cadre d’objectifs professionnels » (www.sfcoach.org), destiné aux cadres responsables d’équipes ou de projets s’inscrit bien dans cette gouvernementalité néolibérale.
Le coaching peut être considéré comme un dispositif2 de communication permettant d’initier les managers, avec pour finalité d’agir sur le savoir être des managers et d’améliorer leurs capacités communicationnelles dans une phase du capitalisme et de l’entreprise où la communication joue un rôle central dans la conduite du changement.
la logique compétence
« la compétence doit être automobilisée par l’individu dans la situation concrète ; les évènements supposent aussi l’intense mobilisation d’un réseau d’acteurs (Zarifian, 1999, p. 39), d’où l’appel à la communication : « la qualité des interactions est désormais centrale pour améliorer la performance des organisations. Ainsi, ce que l’auteur nomme « compétences sociales » au sens d’attitudes ou de comportements, comme l’autonomie, la prise de responsabilité, la communication font partie intégrante de l’approche compétence. Cette dernière nécessite un changement profond dans le mode de contrôle du travail : le contrôle se déplacerait vers une appréciation des résultats, relatifs à des objectifs, pour autant qu’une communication et un accord aient pu être établis sur les enjeux qui sous-tendent ces objectifs (Zarifian, 1999, p. 115). L’évaluation ne peut exister dans cette logique compétences que dans le cadre de valeurs partagées : « Ces valeurs sont éthiques, au sens où elles règlent les comportements pratiques des individus en même temps qu’ils y adhèrent » (Zarifian, 1999, p. 139). L’auteur évoque principalement les « valeurs éthiques professionnelles », soulignant qu’il est hautement improbable qu’une direction générale et des salariés de base puissent partager les mêmes valeurs » (Zarifian, 1999, p. 141).
les exigences productives
l’analyse des pratiques communicationnelles des managers coachés à partir des entretiens semi-directifs montre la force des contradictions qu’ils vivent et mettent en œuvre. Ainsi, la notion d’évaluation ne s’inscrit pas dans des objectifs et enjeux clairement partagés entre hiérarchie et salarié, mais elle pose d’emblée la question du contrôle du travail. Pour Jean Pierre Durand, dans beaucoup de secteurs, (activités de montage trop onéreuses à automatiser, activités de manutention et de transport etc.) mais aussi dans les nouvelles (grande distribution, restauration rapide, centre d’appels) l’observation montre la même division du travail (que celle du taylorisme), habillée de techniques socio-productives (TPM, kaisen, qualité totale). Les procédures seraient ainsi une voie privilégiée de contrôle du travail ; l’autre voie serait celle du contrôle de l’implication subjective du salarié. En fait « les exigences productives nées de la compétition (qualité, variété, productivité) qui apparaissent comme nouvelles, sont aussi des créations et des inventions destinées à justifier l’obligation, pour les salariés, de s’engager sur les objectifs de l’entreprise, de se mobiliser et de faire preuve de loyauté par rapport à celle-ci » (Durand, 2000).
L’implication subjective du manager
une contradiction apparaît constamment entre les réelles formes d’autonomie, de coopération et de communication suscitées par les formes participatives d’organisation du travail ou de fonctionnement des entreprises et le monopole managérial de l’orientation stratégique. Les formes communicationnelles retravaillent constamment cette contradiction au niveau des relations symboliques dans le sens de l’obtention du consensus et de l’engagement productif etc. » (De Crescendo, Floris, 2000). Cette approche peut très bien s’appliquer au coaching : les formes communicationnelles peuvent être analysées à travers la structure du dispositif, mais aussi à travers le vécu de la relation de coaching.
Le coaching : une évaluation du savoir être du manager
8Le coaching a pour finalité d’agir sur le savoir être des managers, sur l’âme, sur la psyché. Ainsi, sur le site de la société française de coaching, on peut lire que« L’accompagnement est un exercice plus ancien, situé à la frontière entre les techniques d’éveil spirituel, d’éducation philosophique et politique, celles favorisant l’émergence d’une conscience morale et la conservation d’un santé psychologique et physique » (www.sfcoach.org).
Affiner la pression sur les résultats: style de communication plus souple
la finalité vaste du coaching réside dans le développement de la personne, dans l’accroissement de nouvelles compétences sociales, civiles dans le cadre des enjeux de la compétence (Zarifian, 2000). Son objectif immédiat consiste à changer le style de communication, destiné à mobiliser les équipes autour des performances financières immédiates : Annick Adre, la conseillère RH d’un groupe industriel nous explique : « Et donc, l’objectif, c’était peut-être d’avoir un mode plus souple, et avec les équipes d’être moins orientée résultat, bien qu’il faille garder cette composante. Mais c’est vrai qu’on ne peut pas non plus etre une machine à faire des résultats. Donc, je pense que j’ai essayé d’introduire, un peu plus d’à côté qu’uniquement l’obtention de résultats. C’est-à-dire que j’ai pris peut-être un peu plus de temps libre avec eux. Et j’essaye de le garder. Donc, ça pourrait être ces exemples-là, que je pourrais vous donner ».(Guilhaume, 2009, p. 117). Dans cet extrait d’entretien, le style de communication plus souple permet de mieux faire accepter par l’équipe la pression sur les résultats.
Le Coaching: dispositif de révélation sur soi
Le coaching est un dispositif d’évaluation, producteur d’une vérité sur soi (d’une « prise de conscience ») dans une visée de sélection portant sur l’authenticité de la personne, déterminant attitudes et comportements : Jacques Bism, consultant-coache rend compte de cette première orientation, dans une parole sur ses pratiques : « Pour moi, le coaching, c’est un accompagnement à la révélation dans le sens révélateur photos, c’est-à-dire mettre en conscience quelque chose qui ne l’était pas, mais qui était déjà présent » (Guilhaume, 2009, p. 82).
COACHING: apprentissage de nouveaux comportements : passage de faire du management à la préoccupation de conduite et d'animation d'équipes. (l'homme passe mais la fonction management des conduites et des équipes reste.
Le coaching est un apprentissage possible de nouveaux comportements : le coaching devient alors un outil d’évaluation et d’accompagnement, permettant d’accroître les performances en termes d’attitudes ou de comportements. Christian Lain, responsable de la stratégie d’implantation tertiaire dans un groupe industriel, montre son changement d’attitude grâce au coaching, qui lui a permis une nouvelle représentation de sa fonction : « Avant, je faisais mon métier, plus du management, parce que j’avais une équipe donc il fallait bien manager, alors que j’ai inversé la chose, maintenant, je bascule dans une préoccupation de conduite et d’animation d’équipe, le temps qu’on me demandera de faire ce métier qui est centré sur l’architecture intérieure, je le fais, mais je sais que ça ne va peut-être pas durer. Alors que la fonction management, elle, va durer. Donc, j’ai inversé l’ordre des facteurs » (op. cit., p. 116).
dispositif d’évaluation (le fameux 360°): le 360°6 est une enquête management avec supérieur hiérarchique, subordonnés et pairs. « cela se remplit en trois minutes, on est coté par son responsable hiérarchique sur quatorze items, coté par son équipe, coté par des tiers avec qui on travaille, d’un à six sur les orientations : argent, résultats, organisationnel, communication, courage, esprit de décision, énergie, esprit d’innovation, intégrité, loyauté… Chacun a sa façon de coter […]Le premier intérêt, c’est qu’on est assez loin entre ce que l’on pense et ce que pensent les autres […] le deuxième intérêt est de voir si tout le monde a à peu près la même appréciation.
Place des événements environnementaux et de l'ordre de la gouvernementalité dans le coaching
Dans les pratiques de coaching, l’analyse des problèmes du coaché renvoie au travail sur la psyché : la stratégie financière, l’organisation du travail, les modes de gestion, les ressources mises à disposition par l’entreprise sont considérés comme un élément environnemental exogène sur lequel on ne peut agir (entretien consultant-coache Jacques Bism, op. cit., p. 84).
Gouvernementalité et préoccupations personnelles de réalisations de soi
« la gouvernementalité, terme qui désigne chez Foucault l’articulation entre les techniques de soi et des techniques de domination » (Heller, 2005) : « Le gouvernement des salariés dans les organisations marchandes actuelles, du moins dans certains secteurs, ne repose pas (ou plutôt de manière différente) sur une imposition, une extraction, un façonnement, mais sur des préoccupations personnelles de construction, d’accomplissement, de réalisation ou de développement de soi. Les techniques de soi consistent donc ici à assurer le lien entre ces deux dimensions (pour soi et pour l’organisation) ».
Coaching des managers et idée-type du manager-communicateur-médiateur
Le manager-communicateur s’incarne dans les figures du médiateur entre le sommet et la base, de l’homme connexionniste qui étend les liens du réseau en s’engageant et en se retirant d’une succession de projets (Boltanski, Chiapello, 1999), du facilitateur, partageant les informations et diffusant une relation de confiance dans le réseau, du mobilisateur, qui sait faire partager une vision, donne naissance à de nouvelles configurations par son art de la catalyse et de la maïeutique, qui se présente comme un manager-coache, mobilisant ses salariés dans le cadre d’une relation personnalisée de proximité.
la communication du Coacher entre le dogme (au sens de la doxa, cadre symbolique des discours conformes, De Crescendo, Floris, 2000) et communication autonome (d’intercompréhension) requise du coaché.
Les propositions du Coacher?: Les attentes que le prescripteur a dans l'employé, ce qu'e le coacher peut lui en faire entendre et ce que l'employé peut intégrer dans sa démarche" »(op. cit., p. 102). La communication du coache oscille donc entre le dogme (au sens de la doxa, cadre symbolique des discours conformes, De Crescendo, Floris, 2000) et la communication autonome (d’intercompréhension) requise du coaché.
Les formes communicationnelles utilisées dans la relation de coaching, s’inspirant des thérapies brèves comportementales, comme la programmation neurolinguistique ou l’analyse transactionnelle participent à une auto-évaluation, fondée sur une introspection par le coaché, rendu seul responsable de ses résultats, devant lui permettre de communiquer et d’agir différemment. Ce processus d’auto-évaluation rencontre une adhésion de la part des managers d’autant plus forte que la pratique communicationnelle des coaches s’inscrit dans l’écoute, le feed-back et l’empathie. La plupart des managers rencontrés dans le cadre de l’enquête expriment une satisfaction à l’égard de leur coache, doté de qualités personnelles et de méthodes efficaces et un attrait pour « l’effet-miroir » qui s’exerce dans le coaching (entretien Jean-Marc Delm, op. cit., p. 113).
DIFFERENTES CRITIQUES DU COACHISME
Contrat de confidentialité: contrat officiel et contrat caché
il y a un « contrat officiel » de coaching qui passe chez l’agent comptable et un « contrat caché » que le coacher établit lui-même avec le coaché et qui détermine donc la façon dont va s’opérer la restitution au commanditaire. C’est donc le consultant-coache qui est garant de l’application du principe de « stricte confidentialité », s’opposant à une restitution individuelle, touchant à la personne du coaché. Seule, l’éthique personnelle du consultant peut éviter alors l’emprise de la hiérarchie sur la psyché de l’individu.
Le coaching: travaille sur la globalité de la personne
la mise en avant dans les discours du caractère essentiellement professionnel du coaching contribue à voiler les risques d’emprise sur la personne à travers les outils d’évaluation de la personnalité, les techniques utilisées en psychothérapie ; un des consultants-coaches interrogés insiste sur le travail sur le « non-conscient », qui donc n’atteint pas l’inconscient de la personne coachée (entretien Jacques Bism, op. cit., p. 83). Pourtant, les managers eux-mêmes reconnaissent le travail sur la globalité de la personne effectué dans le coaching. l’incitation faite à l’introspection dans toutes les sphères de la vie ne fait que servir à mieux discerner ensuite l’impact de l’état de la psyché sur l’engagement professionnel.
Injonction du travail sur Soi versus utilisation d'outils quantitatifs
Les coachers évoquent des démarches d’accompagnement essentiellement qualitatives, alors qu’elle sont dans les faits encadrée par des outils quantifiant les performances de savoir être (outil commePerformanSe, décrit ci-dessus), séparées donc des autres compétences, et découpées elles-mêmes en critères d’évaluation distincts (Le Goff, 1999). Il y aurait dans ces actes de calcul (Fauré, Gramaccia, 2006) une « injonction du management (personnifié par le coache) à agir différemment dans des situations d’urgence dictées par les chiffres », entrant en contradiction avec le travail sur soi basé sur une interprétation critique de l’action et s’inscrivant dans une temporalité plus large.
Dispositif de coaching versus dispositif de sanction
dispositif présenté comme favorisant le développement personnel ou l’accroissement des performances, alors qu’il sert aussi à faire accepter au manager une sanction (résultant donc d’une évaluation antérieure) : nous avons interrogé une responsable de projet informatique dans une SSII, rétrogradée dans une fonction d’assistante de direction, qui s’est vu proposer un coaching par la direction. Dans ce cas, il s’agit d’un « coaching de remédiation », selon l’expression de l’un des consultants-coaches, lui faisant accepter sa nouvelle situation.
Paradoxes entre un modèle de manager proposé (celui du communicateur) et la liberté du coaché de ne pas se conformer à un modèle, paradoxe de la libre parole du coaché dans un cadre contraint, de l’auto-évaluation de la personne dans un dispositif contrôlé, paradoxe d’une évaluation de la personne dans une démarche présentée comme uniquement professionnelle. l’adhésion à ce type de dispositif s’explique par la rencontre entre un « idéal du moi », consistant à inscrire la toute puissance narcissique dans la réalité et un « imaginaire leurrant » proposé par l’entreprise (Enriquez, 1997)
اللهم صل على سيدنا محمد و على آل سيدنا محمد و سلاما و تسليما
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